Éduquer sans punir parce que les punitions, « Ça ne marche pas ! » avec Roseline Roy #152

Éduquer sans punir est une approche qui fait son chemin dans la société française, même si elle est encore regardée trop fréquemment avec suspicion. D'un côté, celles et ceux qui prétendent que les punitions sont indispensables. De l'autre, des professionnels qui expliquent pourquoi et comment éduquer sans punir. Nous sommes allées à la rencontre de Roseline Roy, spécialiste de l'approche Faber et Mazlish. Elle nous explique l'inefficacité des punitions et les bienfaits de l'approche Faber et Mazlish pour la résolution de problème. Découvrez comment éduquer sans punir et favoriser une approche éducative bienveillante et constructive, qui s’appuie sur un cadre éducatif, des règles claires et connues.

Pourquoi punir ne fonctionne pas ?

Time out : entre avantages à très court terme et inefficacité

En cas de crise de colère, de bêtise, de conflit, isoler l’enfant dans sa chambre peut présenter certains avantages :

  • Ça calme le jeu, entre les enfants ou entre parents et enfants.

  • Cela évite aux parents de s’énerver, d’avoir des gestes malencontreux.

Mais qu’est-ce que cela apporte à l’enfant ? 

En France, certains préconisent d’utiliser cette méthode dès un an.
Que peut comprendre un enfant de cet âge-là des émotions qui le traversent, de la situation vécue ?

Chaque enfant le vivra par ailleurs différemment. Roseline Roy l’a elle-même constaté avec ses propres enfants.

  • Avec sa première fille, ne connaissant pas encore l’approche Faber et Mazlich, elle a pratiqué le time out. Résultat, sa fille est entrée dans une colère encore plus noire. Dans sa chambre, elle a déchiré le dessin qu’elle avait fait à l’école pour sa maman. Cette colère s’est nourrie de la situation.

  • Son deuxième enfant vivait lui très bien le time-out. Seul dans sa chambre, il sortait ses jouets. Et lorsque l'isolement prenait fin, c’est comme si rien ne s’était passé. L’enfant était prêt à recommencer finalement.

Où est l’efficacité de la punition si l’enfant n’en comprend pas les tenants et aboutissants ? 

Eduquer sans punir : quand la punition ne sert à rien

Les punitions, des conséquences désastreuses sur l’estime de soi

Punir un enfant, 

  • en l’isolant ;

  • en lui criant dessus ;

  • en répétant en boucle qu’on est en colère et fâché ;

  • en le faisant culpabiliser encore et encore, 

est catastrophique pour son estime personnelle.

Il essaiera de se défendre, mais il affrontera plus fort que lui. L'enfant va alors trouver ça injuste. Il ne va pas comprendre. Certains adultes se disent que ressentir un peu de culpabilité ne lui fera pas de mal et le responsabilisera. Mais un jeune enfant va avant tout se flageller et se penser stupide. De toute façon, on lui répète en boucle, c’est donc qu’il l’est.

Peut-être voudrait-on l’entendre dire « je suis idiot, j'ai mal fait, explique Roseline Roy. Mais en même temps, ça ne favorise pas son estime de soi. Au contraire, un des dangers avec la punition, c'est de vraiment amoindrir cette estime de soi ».

Comment éduquer sans punir ? : 4 étapes

1 - Accueillir les sentiments avant même de punir

L'éducation sans punition repose sur l'idée d'accueillir les sentiments et les émotions des enfants avec bienveillance. Roseline Roy, spécialiste de l'approche Faber et Mazlish a détaillé cette étape essentielle dans un épisode sur comment accueillir les émotions de l’enfant

Elle rappelle que si les parents peuvent exprimer leur ressenti, ils n’ont pas à le faire mille fois pour culpabiliser l’enfant. « Nous avons reçu un appel du directeur. Il a dit que tu as cassé les lunettes de Jérémie. Nous sommes très fâchés ». « On a décrit le problème, puis on a nommé notre sentiment. Point. Puis, on prend le temps d'écouter et de comprendre ce que ressent l’enfant. On pourra alors passer à l’étape suivante », explique Roseline Roy.

Cette approche basée sur l'empathie permet de créer un climat de confiance entre les parents et les enfants. En adoptant une attitude d'écoute active, les parents aident les enfants à exprimer leurs émotions de manière constructive. Et pour le jeune enfant qui ne parle pas encore ou manque de vocabulaire, le parent met des mots sur ses maux.

Prenons l’exemple d’un enfant en colère qui hurle et se roule par terre. Les parents peuvent dire : « je vois que tu es très en colère » plutôt que de réprimander en disant « arrête ton cinéma ».

En reconnaissant les sentiments de l'enfant, les parents lui montrent qu'ils sont là pour le soutenir et l'accompagner dans la gestion de ses émotions et que ces dernières sont légitimes. On a le droit d’être en colère, d’être triste, de trouver ça injuste, d’être très heureux, etc.

2 - Exposer le problème plutôt que de punir en isolant

La deuxième étape consiste à exposer le problème. Le parent pose le problème. Quand les enfants sont plus grands, ils peuvent le faire eux-mêmes.

Roseline Roy explique qu’il faut que :

  • ce soit un problème très précis, très clair et concis ;

  • on ne peut pas aborder dix problèmes à la fois : on ne règle pas les soucis liés au coucher et ceux concernant les préparatifs du matin pour être à l’heure, en même temps. On reste concentré sur un problème à la fois

Roseline Roy prend l’exemple d’une petite fille qui adore bricoler, en étalant son matériel par terre. Tant que son petit frère dort, tout va bien. Mais à son réveil, il court le risque de mettre à la bouche des petits objets qui traînent sur le sol. Le problème est le suivant : comment respecter son envie de créer sans mettre en danger son frère ?

3 - Chercher des solutions plutôt qu'une punition

Vient alors la troisième étape : la discussion, entre parents et enfants, des solutions possibles. 

Cette approche permet de développer chez les enfants des compétences :

  • en résolution de problèmes ;

  • en prise de responsabilité.

Les enfants sont impliqués dans la recherche de solutions. Les parents leur donnent ainsi une voix. Ils les aident à se sentir plus autonomes. Les décisions prises ensemble favorisent une meilleure compréhension des conséquences de leurs actes. Elles encouragent le respect des règles établies.

Ces idées, qui peuvent venir des enfants et des parents, sont couchées sur le papier. Cette liste d’idées est généralement très appréciée des enfants.

4 - S’accorder sur un compromis pour éduquer sans punir

Puis place à l'étape 4, celle du consensus. Il va falloir que chacun se prononce sur l’idée qu’il aime le mieux. C’est le temps du compromis. Parfois, le parent et l’enfant retiennent la même solution. De temps en temps, il va peut-être falloir aménager une solution avec le bout d’une autre pour trouver un accord. La liste des idées est alors passée en revue pour trouver la meilleure solution pour les deux parties. 

Roseline Roy explique que

« l'enfant fait partie de la solution et il aide à trouver des solutions. »

Éduquer sans punir, ça marche !

Elle rappelle que les études l’ont montré : « les enfants qui sont punis ont beaucoup plus de chances de réitérer, de refaire la même chose ou de faire pire encore ou faire autre chose.  »

« Si on veut créer des futurs petits hors la loi ou tout ça, on peut continuer à punir nos enfants », conclut-elle. Mais si on veut créer des enfants capables d’assumer la responsabilité de leurs actes, il faut leur apprendre à être responsables et à réparer.

L'éducation sans punition suppose d'adopter l'écoute active et la résolution de problèmes. Certains rétorqueront qu'ils n'ont pas le temps de gérer les conflits et les bêtises de cette façon. Roseline Roy avance deux contre-arguments :

  • Si on ne prend pas le temps pour ça, le problème se répète.

  • Le temps passé à crier, à se disputer, à dispenser de mauvais sentiments entre parents et enfants prend également du temps... d'autant plus que le problème reviendra sur la table, ce qui n'est pas le cas en appliquant la méthode Faber et Mazlish.

Et nous pourrions rappeler que la violence éducative ordinaire est interdite et sanctionnée par la loi. Se défaire du modèle éducatif du passé et adopter une éducation bienveillante pour éduquer sans punir, c'est possible... et plus que positif pour nos petits adultes de demain. 

Références :
Les livres de Adele Faber et Elaine Mazlish, traduits par Roseline Roy :

Les livres de Joanna Faber et Julie King :

Le podcast Les Adultes De Demain :

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