Découvrir la nature en ville : éveiller les enfants à la nature urbaine avec Joana Da Silva #168

Comment ne pas culpabiliser du manque de nature pour les enfants lorsque l'on vit en ville ? Comment leur faire néanmoins découvrir la nature en ville et l’amener à l'intérieur de nos foyers ? Comment profiter des espaces extérieurs lorsque l'on ne vit pas à la campagne ? Autant de questions auxquelles Joana Da Silva, hôte du compte instagram S'éveiller naturellement apporte des réponses pour vous aider à reconnecter les enfants à la nature et ce, même en milieu urbain. Prêt à relever le défi ?

Découvrir la nature en ville : changer son regard

On peut effectivement avoir cette impression d’être privé de nature en milieu urbain. Mais si l’on change son regard sur ce qu’est la nature, on se rend compte qu’elle est en fait à portée de nous. C’est le conseil que donne Joana Da Silva, professeure des écoles, autrice, formatrice sur tout ce qui touche à la nature et aux enfants.

Cette maman de 4 enfants explique que même si on n’aura pas accès à la même nature qu’à la campagne, on peut quand même trouver des petites choses du quotidien sur lesquelles poser son regard pour se reconnecter. Rien que sur le chemin de l’école, on peut inviter les enfants à observer les arbres, les oiseaux, les petites plantes sauvages qui font leur chemin dans les trous de bitume. 

Ces petits éléments nous permettent de prendre conscience que la nature est présente tout autour de nous. Ces premiers pas vont donner envie d’aller plus loin, de sortir le week-end ou après l’école.

Un mot d’ordre donc : stop à la culpabilité pour faire avec ce qui nous entoure !

Sortir de chez soi pour se reconnecter à la nature

Pour sensibiliser

Pourquoi est-ce si important de sortir de chez soi ? Joana fait remarquer que nous sommes dans une société qui enferme. Les enfants bougent de moins en moins et ne sont plus du tout connectés à la nature. Beaucoup d’enfants ne savent pas reconnaître un pissenlit ou une pâquerette, ces fleurs si communes dans les coins d’herbe. 

Les adultes, parents, enseignants, nounous, animateurs ont un rôle d’éducateur à jouer en créant ce lien entre l’enfant et la nature. 

Cette relation est essentielle pour les enfants car  :

  • Elle va les aider à grandir. Les bienfaits de la nature ont été prouvés scientifiquement, tant au niveau cognitif qu’émotionnel, psychologique ou physique. L’enfant a besoin de nature. Elle va soutenir son développement.

  • On a besoin d’éveiller les enfants afin qu’ils prennent cause pour la nature avec la crise climatique actuelle. Leur transmettre l’amour et la gratitude pour leur environnement, c’est contribuer à en faire des protecteurs. 

👂 Écoutez les 2 pauses éducatives sur le sujet :
Pourquoi connecter les enfants à la nature et comment les connecter.

Pour laisser l’enfant expérimenter

L’arrivée en masse des écrans a contribué à cette sédentarité, mais aussi à cette satisfaction immédiate. Or, dans la nature, on est dans une autre relation au temps. Place à la lenteur, à laquelle il faut habituer l’enfant pour qu’il puisse l’apprécier. Progressivement, on l’amène à aimer ces moments dans la nature en lâchant prise et en le laissant jouer librement. 

Souvent, les parents ont peur que l’enfant se blesse. Or, l’enfant est capable de prendre des risques mesurés. Parmi les émotions primaires, on trouve celle de la peur, qui lui donne conscience du danger. Laissons-le expérimenter lui-même sans être constamment sur son dos à lui dire « attention, non stop ! Tu vas te faire mal ».

La nature est un environnement idéal pour que l’enfant apprenne par lui-même. L’adulte surveille bien sûr, mais il n’intervient pas en anticipant un potentiel danger. Si cette acclimatation est progressive, il y a peu de risques que l’enfant se blesse. C’est plus lorsque les enfants ne sont pas du tout habitués à évoluer dans un milieu naturel, qu’ils peuvent se mettre en danger. D’où la nécessité d’y aller progresssivement. 

Pour cultiver l’émerveillement

Tout ceci présuppose que l’on soit déjà soi-même enthousiaste à l’idée de sortir. Transmettre son amour pour la nature, c’est le partager et cultiver cet émerveillement que l’on a déjà soi-même, pour en semer quelques graines chez l’enfant. Pour Joana, « la nature nous fait du bien, si on se reconnecte soi, d'abord. On va alors ressentir toutes ses émotions et tous les bienfaits. Et ensuite, on pourra les partager avec nos enfants ». Quand on est connecté, on ressent moins de stress, on peut décharger ses émotions. Le milieu naturel nous apaise. Il en sera de même pour les enfants dont les émotions débordent. Sortir dehors les apaisera.

L’émerveillement, c’est aussi ce qu’a évoqué Clément Debosque
lorsqu’il a présenté le
jeu sur l’écologie, Ma Petite Planète scolaire,
un challenge à relever en classe, dehors, à la maison, avec les élèves. Découvrez-le

Profiter de son jardin

Quels aménagements extérieurs ?

On peut vivre en milieu urbain et avoir la chance de posséder un jardin. On peut alors prévoir quelques aménagements propices à l’exploration sensorielle et motrice : 

  • une cuisine à la gadoue ;

  • un bac d'exploration ;

  • des bacs à patouille ;

  • un coin portager ;

  • un bac à sable ;

  • des petites balançoires ou des petits hamacs, pour vraiment travailler le système vestibulaire.

Sortir dans son jardin, c'est déjà une connexion à la nature.

C’est salissant ? Et alors !

Joana Da Silva le rappelle : « la nature, ce n’est pas sale, c’est juste un petit peu salissant ». Il suffit de s’équiper en conséquence, avec des vêtements qui ne craignent pas d’être salis, peut-être un peu abimés. Il existe aussi des combinaisons. 

Il est nécessaire de lâcher prise sur ce point. Il faut avant tout se dire que c’est au bénéfice de l’enfant, de ses apprentissages, de son développement, de son éveil. Il a besoin de développer ses sens, d’explorer, de toucher, d’aller à la rencontre du vivant, de sauter dans les flaques, de manipuler la boue, de creuser la terre, de grimper aux arbres, etc. 

En intérieur, il est possible de dédier un espace, facilement lavable, que l’enfant pourra salir, toucher, explorer. Une grande toile cirée sur le sol ou une bâche font l’affaire. Même en intérieur, il est important de lâcher prise et d’aménager l’environnement. On peut ainsi faire entrer la nature dans l’appartement, pour multiplier les occasions d’être aux contacts d’éléments naturels.

Éduquer à la nature en intérieur

Le lien à la nature n’est donc pas seulement réservé à ceux qui ont un jardin. 

La table des saisons

Joana suggère de profiter des balades pour ramasser des feuilles, des petits fruits d’automne, des fleurs au printemps, des petits éléments trouvés sur le chemin. Les enfants adorent faire des cueillettes et des collections. 

En rapportant tous ces trésors à la maison, on peut mettre en place une petite table des saisons. L'idée est de se créer sur une petite étagère ou un petit meuble, un espace qui montre comment la nature évolue au fil des saisons.  L'enfant est invité à poser les éléments trouvés dehors au fil de ses sorties. En voyant l’évolution, il va s’interroger. 

Ce coin nature devient un support d’apprentissage et de recherche scientifiques. On ajoute de la documentation pour éveiller un petit peu la curiosité de l’enfant : albums documentaires, imagiers des feuilles d’arbre pour apprendre à les reconnaître, etc. On peut ajouter une petite loupe pour les plus jeunes, un microscope pour les plus grands. 

Des bacs sensoriels

On peut aussi proposer des petits bacs sensoriels avec un peu de terre et de feuilles ou des sables et des coquillages l’été. On laisse à disposition des petits outils.

Un mini potager et des plantes vertes

Et rien n’empêche de créer un petit coin potager sur un petit balcon ou en accrochant une jardinière au rebord d’une fenêtre. Au printemps, on peut planter des radis, des pieds de tomates, des haricots verts, des petites fleurs. On peut faire pousser beaucoup de choses. Cela permettra à l’enfant de découvrir ce cycle des végétaux, de savoir comment on fait pousser des légumes. Et objectif ultime, de les utiliser pour s’alimenter sainement.

Agrémentez votre intérieur de quelques plantes vertes et invitez l’enfant à en prendre soin.

Et par la fenêtre, on n’oublie pas d’observer les oiseaux, en utilisant des jumelles.  

Décider d’adopter un animal de compagnie

L’adoption d’un animal de compagnie ne se prend pas à la légère, même si les enfants sont en général très demandeurs. C’est une décision à prendre en famille, après mûre réflexion sur l’organisation que cela va nécessiter. 

Joana rappelle que des études ont montré la grande richesse d’une telle compagnie pour un enfant en termes de développement. Il prendra davantage confiance en lui. Il établira une relation particulière avec l’animal, qui deviendra son confident. Il développera sa propre autonomie, notamment via les soins qu’il faudra apporter à l’animal. Il prendra des responsabilités. Il le câlinera aussi et devra adapter ses gestes. Ce dernier point n’est pas à négliger. En effet, quand l’enfant est petit, il a encore du mal à contrôler ses mouvements et peut, sans le vouloir, embêter l’animal qui peut mal réagir. 

Un animal, c’est beaucoup de bénéfices pour l’enfant, mais c’est aussi une responsabilité supplémentaire, un être dont il faut prendre soin, à tout moment. 

Défi une heure dehors… même quand il pleut !

Joana Da Silva est à l’origine du programme « une heure dehors », qui propose chaque mois des activités pour prendre soin de soi, des autres, de la nature, ainsi que des idées pour l’école du dehors. C’est aussi l’occasion de rejoindre une communauté de parents engagés dans cette reconnexion à la nature.  

Joana recommande de sortir même s’il pleut, toujours avec cette posture de lâcher prise. Certes, le froid, la pluie ne donnent pas envie de sortir. Mais elle explique qu’en s’obligeant à le faire, en s’équipant correctement de bottes, imperméables, serviettes dans le sac à dos et petites boissons chaudes, parapluies, cela devient une sortie très enrichissante et satisfaisante.

On entend les gouttes d’eau tomber sur le parapluie, on saute dans les flaques, on éclabousse. Si on ne sort que lorsqu’il fait beau, on risque de ne pas voir la fête des escargots et des limaces lorsqu’il pleut. Ce n’est pas la même faune qui se rend visible. Et puis, les parcs sont vides, les sons ne sont plus les mêmes. On entend l’eau qui ruisselle et coule dans les bouches d’égoût. C’est vraiment une nouvelle expérience sensorielle. La sortie sera plus courte qu’en période de beau temps, mais elle aura le mérite d’exister et de montrer à l’enfant la nature sous un autre jour. D’autres questions émergeront : pourquoi une flaque se forme à cet endroit ? Où va l’eau des caniveaux ? Etc.

L’hiver, on s’emmitouffle dans un blouson , on se coiffe d’un bon bonnet pour avoir chaud à la tête. Et on observe de nouveau une nature différente, même en milieu urbain. Pour tout vivre sensoriellement, Joana préconise aussi les balades nocturnes. Les enfants adorent, équipés de leurs lampes frontales. Quand les jours raccourcissent en automne, cela permet de sortir en fin de journée, même s’il fait vite sombre. De nouveau, on n’entend ni ne voit les mêmes choses : oiseaux nocturnes, crapauds…  

Alors, prêts à inscrire les sorties nature, même en ville, à votre quotidien et à celui de vos enfants ?

Pour en savoir plus, écoutez l’intégralité de l’épisode et découvrez les contenus proposés par Joana sur son site S’éveiller Naturellement

 

Référence :
Mon petit cahier éco-optimiste, Joana Da Silva, éditions Solar

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