Comment faire aimer l’école aux enfants ? avec Emilie Hanrot #214

Comment faire aimer l'école aux enfants ? Cette question est au cœur des préoccupations de nombreux enseignants et parents. Pour Émilie Hanrot, enseignante depuis 20 ans et autrice du livre Kiffer l’école publié chez Hachette, la réponse réside dans une approche bienveillante, joyeuse et tournée vers la coopération. Son objectif principal : que chaque élève reparte de l’école en se disant « J’ai envie d’y retourner demain. »

Dans cet épisode du podcast Les Adultes de demain, Émilie partage son parcours, ses anecdotes, et ses méthodes pour instaurer un climat scolaire positif et épanouissant. Sa démarche, profondément ancrée dans la Communication Non Violente et la discipline positive, s’adresse non seulement aux enseignants, mais aussi aux parents. Car selon elle, « l’éducation, c’est sérieux, mais ça ne sert à rien de se prendre au sérieux. »

À travers cet article, nous explorerons ses conseils, outils et expériences inspirantes, utiles pour transformer le quotidien des enfants en un moment d’apprentissage et de plaisir.

 Pourquoi est-il important de faire aimer l'école aux enfants ?

L’école est bien plus qu’un lieu d’apprentissage des savoirs fondamentaux. C’est aussi un espace où se construisent les bases du développement émotionnel et social des enfants, même si, comme le rappelle Kelly Lambert dans l'épisode sur l'instruction en famille, d'autres façons de développer sa socialisation sont possibles.

Pour les enfants qui vont à l'école, la leur faire aimer l’école reste donc un enjeu crucial : c’est là que se cultivent une bonne partie de leur curiosité, de leur confiance en eux, et de leur goût pour l’effort.

Pour Émilie Hanrot, l’école doit être un lieu où chaque enfant trouve plaisir et motivation. « Lors de mes réunions avec les parents en début d’année, je leur parle des programmes, mais surtout, je leur dis que mon objectif principal, c’est que leurs enfants aient envie de revenir. » Cette approche dépasse la simple transmission des connaissances et vise à ancrer une relation positive avec l’apprentissage.

L’attitude enthousiaste d’un enseignant peut transformer l’expérience scolaire des élèves. La joie et l’énergie transmises en classe jouent un rôle clé dans leur motivation et leur implication. « L’énergie que les enfants me donnent, elle est toujours là. Quand la journée démarre et que les enfants m’apostrophent, ça n’a pas bougé : le plaisir d’être parmi eux est intact. »

Cette démarche ne profite pas qu’aux élèves. Elle inspire aussi les parents à adopter un regard plus positif sur l’école. Cela renforce ainsi une relation de coopération bénéfique entre la maison et l’établissement scolaire.

En cultivant un climat de classe bienveillant et stimulant, l’école peut devenir un lieu où chaque enfant trouve sa place, s’épanouit et développe une véritable envie d’apprendre.

Faire aimer l'école aux enfants

Faire aimer l’école aux enfants : préserver leur enthousiasme, ne plus vouloir tout maîtriser, les observer…

4 dispositifs et outils pour faire aimer l'école aux enfants

1 - Créer un climat de classe positif : accueil et co-construction des règles

Accueillir l'enfant et sa famille

Pour Émilie Hanrot, l’accueil est bien plus qu’un geste quotidien. C’est un fondement de sa pratique enseignante, qui s’adresse autant aux élèves qu’à leurs familles. Chaque matin, elle salue individuellement les enfants et leurs parents, prenant soin d’échanger un mot chaleureux :

«  Je suis dans l'accueil. Ça commence comme ça, je pense que c'est la base : c'est hyper important de saluer les enfants, avoir un petit mot pour chacun. Moi j'aime bien saluer le petit frère, la petite sœur, avoir un mot aussi pour les parent »

Émilie a appris à accueillir aussi ce que les parents peuvent lui apporter.

« Je me rends compte que les parents nous confient ce qu’ils ont de plus précieux : leurs enfants, la prunelle de leurs yeux. »

Cette prise de conscience l’a amenée à écouter leurs préoccupations avec plus d’ouverture.

« J’arrive mieux à accompagner mes élèves parce que je parviens à mieux accompagner leurs parents ou, en tout cas, à être à leur écoute. »

Accueillir chaque élève dans ses besoins spécifiques

Mais l’accueil ne se limite pas à ce geste quotidien. Il s’étend à une démarche plus large, où chaque enfant est accueilli dans sa singularité. Lorsqu’un élève traverse une période difficile, Émilie veille à dépasser les comportements observables pour chercher à comprendre l’enfant :

« J'apprends à retirer l'étiquette qui est collée sur le dos de cet enfant. Donc j'essaie de me dire : non, il n'est pas violent, il n'est pas insupportable, il n'est pas perdu d'avance. »

Plutôt que de se focaliser sur ce qui ne va pas, elle préfère valoriser les forces et les compétences de l’élève.

« Aller voir cet enfant pour le mettre en valeur, pour lui montrer qu'il est le bienvenu, qu'il a sa place dans la classe, qu'il est compétent parce que tous les enfants le sont dans certains domaines. »

Cette approche demande aussi un travail sur soi.

« Ce n'est pas facile, et ça demande qu'on soit soi-même maître de ses émotions. »

Pour Émilie, cela s’accompagne d’un environnement bienveillant où les enseignants peuvent collaborer et ne pas se sentir isolés face à ces défis.

L’accueil s’adresse donc aussi aux élèves à besoins particuliers. Émilie regrette toutefois le manque de formation initiale pour accompagner tous les enfants dans leurs spécificités.

« Je crois qu'aujourd'hui, on gagnerait tous à être formé autour des neurosciences, de la neurodiversité aussi et j'ai récemment fait une formation sur l'autisme et j'ai trouvé ça vraiment super passionnant ».

Ce qu’elle met en place pour répondre aux besoins de certains élèves profite souvent à l’ensemble de la classe :

« Ce qui est intéressant, c'est que tout ce qu'on apprend pour les enfants porteurs de handicap, au final, si on le met en place dans nos classes, on se rend compte que ça sert absolument tout le monde. Et ça c'est vraiment quelque chose qui, je pense, devient indispensable. C'est se dire qu'on peut accueillir tous les enfants quels qu'ils soient dans les meilleures conditions. Mais pour ça il faut qu'on soit formé ».

Co-construire les règles

Les règles de la classe, loin d’être imposées de manière unilatérale, sont élaborées avec les élèves. Elles sont co-construites avec eux pour qu’ils en comprennent le sens et s’y engagent pleinement. « Dès le début de l’année, on se met d’accord sur ce qu’on a le droit de faire et ce qu’on n’a pas le droit de faire. »

Ensemble, ils définissent ce qui est permis ou interdit, ce qui renforce le sentiment de sécurité et d’appartenance des enfants. Ce cadre, clair et collaboratif, donne aux élèves les repères nécessaires pour évoluer sereinement tout en se sentant respectés.

2 - Encourager la motivation intrinsèque et l'autonomie de l’enfant

Émilie privilégie une approche où les enfants sont libres de choisir des activités qui les inspirent. Sa classe est un véritable laboratoire d’expérimentation : « Entre et choisis une activité qui te plaît. Si ça ne fonctionne pas, je lâche. Si ça prend, j’encourage. » Cette méthode permet aux élèves de développer leur curiosité et leur envie d’apprendre par eux-mêmes.

Elle valorise également les réussites individuelles, un levier essentiel pour responsabiliser les élèves.

« Ce que j’adore aujourd’hui, c’est regarder mes élèves au travail, en action. Ils développent une motivation intrinsèque qui émerge de leur propre initiative. »

En soutenant chaque enfant dans ses efforts, Émilie renforce leur confiance en eux et leur autonomie.

3 - Exploiter les émotions pour apprendre

Dans la classe d’Émilie, les émotions sont une ressource éducative. À travers des activités hebdomadaires, elle invite les élèves à explorer leurs ressentis :

« j'instaure des moments, comme une sorte de groupe de parole où je vais demander à chacun d'aller chercher une chaise, on se met en rond donc ce n'est vraiment plus un savoir descendant. Je vais proposer soit une image soit une situation inductrice. En début d'année, je leur ai déjà montré une photo d'un enfant qui se tient les genoux et qui a l'air de pleurer. Je leur ai demandé ce qu'ils voyaient, ce qu'ils pouvaient en conclure, ce qu'ils imaginaient que l'enfant avait pu vivre, comment il se sentait. Et après je leur demande de dessiner une situation où eux aussi se sont sentis comme ça. »

Ces exercices permettent aux enfants de développer leur vocabulaire émotionnel et d’apprendre à identifier et exprimer leurs ressentis

« C’est de la dictée à l'adulte, donc en plus, on est vraiment dans les programmes, c'est-à-dire que les enfants vont petit à petit aussi affiner leur vocabulaire, leur syntaxe. Au début, j'écris vraiment tel quel ce qu'ils me disent, puis à la fin de l'année, quand je leur relis ce qu'ils me dictaient en début d'année, c'est vraiment mignon parce qu'ils se rendent compte qu'ils ont évolué eux aussi. Donc on fait du français, on fait du langage oral et écrit tout en travaillant les émotions ».

4 - Gérer les conflits avec la communication non violente (CNV)

La CNV, un manuel pour mieux communiquer

Pour Émilie Hanrot, la Communication Non Violente (CNV) et la discipline positive sont des outils précieux, particulièrement dans les moments où elle sent qu’elle pourrait perdre patience.

« Je me rappelle de choses très basiques : 'tu n’accuses pas', 'parle des faits'. Cela m’aide à formuler les choses et à prendre un petit temps de recul pour analyser ce que la situation me fait. Du coup, ça me permet d’être dans l’action et pas dans la réaction. »

Cette approche l’aide à adopter un langage factuel et apaisé, aussi bien avec les élèves qu’avec les adultes. Elle souligne l’importance de réfléchir à ses formulations :

« Quand on est pressé par le temps, on n’est pas obligé de faire subir son humeur aux autres. Je fais attention à comment je formule les choses, et cela change tout. »

La gestion des conflits entre élèves

Pour gérer les conflits en classe, Émilie Hanrot applique donc des principes inspirés de la Communication Non Violente. Elle encourage les enfants à exprimer leurs besoins et émotions avec bienveillance. L'utilisation de la communication non violente permet d’apaiser les tensions et de responsabiliser les élèves.

« Quand un conflit éclate, je donne la parole à chacun, reformule leurs ressentis et les aide à trouver eux-mêmes une solution. »

Pour la gestion des conflits, elle utilise des symboles simples comme la girafe, symbole de bienveillance et d’écoute, et le chacal, qui incarne l’agressivité et l’accusation, pour aider les enfants à identifier leurs comportements.

« Parfois, je leur dis : 'Essaie de dire la même chose, mais un peu plus girafe.' »

Émilie recommande notamment les travaux de Faber et Mazlish, des autrices reconnues pour leurs ouvrages sur la communication parent-enfant. Dans Parler pour que les enfants écoutent, écouter pour que les enfants parlent, elles proposent des techniques précieuses pour mieux comprendre et accueillir les émotions des enfants et favoriser des échanges respectueux. 

« C'est chez elles que j'avais entendu [...] : on n'a pas besoin quand on est en conflit avec quelqu'un d'avoir quelqu'un qui dise qui est le coupable et qui a raison, qui a tort et qui donne la punition à l'un ou à l'autre ».

Ce principe transforme la gestion des désaccords en une opportunité d’apprentissage pour les enfants.

Les limites des approches traditionnelles de la gestion des conflits

Émilie exprime son désaccord avec certaines pratiques courantes, comme celle de minimiser un conflit ou de forcer une réconciliation artificielle.

« Je suis toujours effarée en cours de récréation quand je vois deux enfants qui sont sur le point de se frapper, se griffer et qu'un collègue va leur dire : 'Bon allez serrez-vous la main, c'est rien.' »

Pour elle, cette approche est problématique à plusieurs niveaux.

Premièrement, banaliser un conflit en disant « ce n'est rien » passe à côté de la réalité émotionnelle des enfants. « Pour nous, adultes, cela peut sembler insignifiant, mais pour les enfants, ce n’est clairement pas rien. »

Deuxièmement, exiger une réconciliation immédiate, comme serrer la main de celui qu’on perçoit encore comme une menace, est irréaliste : « Moi, je serai incapable d’aller faire la bise à quelqu’un qui m’a insultée 2 minutes avant. »

L’importance de comprendre et de reformuler en cas de conflit

Au lieu de chercher à effacer un conflit, Émilie privilégie une approche où chaque partie est écoutée et où les ressentis sont reformulés.

« Comprendre le point de vue de l’autre et avoir un adulte ou quelqu’un d’extérieur qui reformule ce que j’essaie de dire, ça change tout. »

Elle donne la parole à chacun, en veillant à dégrossir les échanges et à clarifier leurs besoins :

  • « Alors toi, tu l’as vécu comme ça et tu as ressenti ça, d’accord. »

  • « Et toi, tu aurais besoin de quoi ? Tu aimerais ça ? »

Cette démarche permet souvent aux enfants de trouver eux-mêmes une solution ou de réaliser que la situation n’était pas aussi grave qu’ils le pensaient. Cela ne se fait pas sans effort :

« Ça prend du temps et ce n’est pas facile, mais je pense que c’est du temps perdu qui est gagné pour plus tard. »

L'effet vertueux de la communication non violente sur la classe

Pour Émilie, cet investissement va bien au-delà des deux enfants concernés.

« Ce qui est génial, c’est qu’il suffit de le faire une fois pour que ça marche sur ces deux enfants, mais aussi sur toutes les personnes qui sont autour. »

Chaque résolution de conflit devient une opportunité d’apprentissage collectif. Les témoins apprennent à observer des comportements bienveillants et à intégrer eux-mêmes ces pratiques.

En prenant le temps de gérer les conflits avec empathie et compréhension, Émilie aime semer des graines de respect et de coopération. Cette approche, bien que plus longue sur le moment, porte ses fruits à long terme en formant les enfants à devenir des médiateurs dans leurs relations futures. Et du côté enseignant, à force de l'utiliser, elle devient comme un automatisme.

Faire aimer l'école grâce à une coopération parents-enseignants

Accueillir les parents comme des partenaires essentiels

Comme déjà évoqué, Émilie Hanrot accorde une grande importance à l’accueil des parents. Elle les considère comme des partenaires essentiels dans le parcours éducatif des enfants. La relation et la communication qu'elle entretient avec eux contribuent à faire aimer l'école aux enfants. Ces derniers voient le rapport de confiance qui s'établit entre les adultes et sentent qu'ils peuvent s'épanouir pleinement dans la classe.

Quand on lui demande si elle trouve que les parents ont changé en 20 ans, elle constate surtout son changement à elle.

« Je ne m'adresse pas aux parents de la même façon, je pense. Et je pense que c'est moi qui ai évolué donc j'imagine que les problématiques sont les mêmes : il y a des parents inquiets, des parents qui ont notre confiance ou qui nous l'accordent et d'autres qui ne nous l'accordent pas. Je ne pense pas que ça, ça ait grandement changé. Mais en revanche la façon dont moi, je vais interagir avec les parents, oui ça, ça a beaucoup évolué. [...] Aujourd'hui, je suis beaucoup plus dans l'accueil de ce qu'ils ont à m'apporter eux et je pense que j'y gagne pour l'élève en fait ».

Impliquer les parents dans la vie de la classe

Pour Émilie, accueillir les parents, c’est aussi leur offrir une place dans la vie de la classe. Elle les invite à participer à des activités, à découvrir le travail de leurs enfants et même à partager leurs talents. Elle leur ouvre régulièrement les portes pour qu’ils découvrent le quotidien de leurs enfants et partagent leurs talents.

« En début d’année, je dis toujours aux parents qu’ils sont invités à passer une matinée dans la classe ou à venir présenter quelque chose. Par exemple, un musicien pourrait venir jouer d’un instrument, ou un parent raconter une histoire dans sa langue maternelle. »

Ces initiatives permettent aux familles de mieux comprendre le fonctionnement de la classe et de renforcer leur lien avec l’enseignante. Elle les incite à voir les réalisations de leurs enfants en arts plastiques, elle partage les jeux de société qu'ils apprécient. 

Autorité ou coopération : un changement de perspective

L'impasse de l'autorité

Pour Émilie Hanrot, le mot « autorité » n’est pas adapté à sa vision de l’enseignement.

« Plutôt que de chercher à être autoritaire, à avoir de l'autorité sur les enfants, ce n'est pas de ce côté-là qu'il faut se tourner. C'est plus du côté de la coopération. »

Elle estime qu’imposer une autorité stricte peut conduire à des impasses.

« Si on force un enfant à suivre des règles qu’il n’a pas envie de suivre, on ne lui laisse que deux choix : la rébellion ou la soumission. Un enfant soumis ne travaillera pas avec plaisir, et un enfant qui se rebelle, probablement pas non plus. »

Cette réflexion l’a amenée à privilégier l’écoute et la compréhension des comportements, notamment quand ceux-ci sont inappropriés.

« Un enfant qui a un comportement inacceptable a souvent de bonnes raisons d’agir ainsi. Si on ne se penche pas sur ses raisons, qu’est-ce qu’on fait ? On l’oblige quand même ? »

Pour elle, la solution réside dans la prise en compte des ressentis des élèves et la création d’un climat où chacun se sent compris et respecté. Cette démarche, axée sur la coopération, ne signifie pas l’absence de cadre, mais repose sur des règles co-construites et des relations équilibrées.

Poser un cadre bienveillant

Pour Émilie Hanrot, bienveillance et cadre ne sont pas incompatibles. Au contraire, un cadre clair et juste est essentiel pour rassurer les élèves tout en leur permettant de s’épanouir. Dès le début de l'année, ce qui est autorisé ou ne l'est pas est fixé avec les élèves.

A l'instar de ce qu'Isabelle Filliozat expliquait dans l'épisode sur l'éducation positive sans laxisme, Émilie rejette l’idée que bienveillance rime avec laxisme.

« Les gens confondent bienveillance et le fait qu’il y a des règles pour vivre en société et on ne peut pas les outrepasser sous prétexte que ce sont des enfants, qu'ils ont besoin de chahuter. Donc ça ne me choque pas non plus de dire à un enfant : non dans le bus tu ne tapes pas des pieds, tu ne mets pas tes pieds sur la chaise d'en face, tu ne cognes pas la vitre ».

Faire aimer l'école en favorisant l'enthousiame

Faire aimer l’école, c’est offrir aux enfants un espace où ils peuvent s’épanouir, expérimenter, et développer leur propre motivation. Émilie Hanrot partage cette vision avec passion, en expliquant qu’elle apprécie désormais de prendre un pas de recul pour observer ses élèves au travail.

« C'est ça que j'aime aujourd'hui : je suis arrivée à un point où j'apprécie pouvoir regarder mes élèves au travail, en action. Et moi, pouvoir prendre un petit pas de recul et je pense que c'est ça qui est difficile quand on débute, c'est qu'on a envie d'avoir et d'être partout à la fois que les enfants soient assis à leur table, qu'on sache qui fait quoi à quel moment et oui puis surtout de maîtriser en fait. Et plus on lâche ça, plus les enfants finalement développent une envie de faire par eux-mêmes et leur motivation intrinsèque va pouvoir émerger. »

Si Émilie reste source de motivation extrinsèque et celle qui étaye, soutient, valide, encourage, elle apprécie de laisser suffisamment de liberté aux enfants pour que d'eux-mêmes, ils aillent vers ce qui les intéresse.

À travers son expérience, Émilie souhaite transmettre aux enfants un bien précieux : l’enthousiasme, ce fameux enthousiasme de l’enfant dont parle André Stern.

« Je leur souhaite d’avoir de l’enthousiasme et d’avoir de la motivation, quelle que soit la motivation qu’ils ont, parce que c’est déjà tellement chouette d’être motivé par quelque chose. »

Elle insiste aussi sur l’importance d’accepter les erreurs comme partie intégrante du cheminement. « Pas forcément de la réussite, parce que quand on se plante, on avance aussi. »

En remplaçant l’autorité par la coopération, en donnant aux enfants la liberté d’explorer dans un climat de classe bienveillant et enthousiasmant, Émilie Hanrot montre que faire aimer l’école, c’est bien plus qu’enseigner : c’est accompagner chaque enfant dans la découverte de ses envies et la construction de sa confiance en lui.

Comment Émilie Hanrot a construit sa vision de l'école « positive » ?

Un parcours atypique et une vocation d’enseignante révélée tardivement

Devenir enseignante n’était pas une évidence pour Émilie Hanrot. Son parcours a été marqué par des détours enrichissants : études d’anglais, école d’architecture intérieure et de design, et même un tour du monde. Mais c’est en croisant des enfants dans un contexte professionnel qu’elle a eu un déclic :

« Ils ont illuminé ma journée. Je me suis dit : en fait, c’est ça que j’ai envie de faire. Ma vie aurait plus de sens si je travaillais avec des enfants. »

Cette vocation tardive, alliée à son ouverture au monde, a façonné une enseignante différente, en quête constante de sens et de plaisir dans son métier. Pour elle, la joie est un moteur essentiel de l’apprentissage. Et elle aime en donner à ses élèves pour que lorsqu'ils partent de l'école, ils aient envie d'y revenir.

Une posture professionnelle en constante évolution

Émilie Hanrot n’hésite pas à reconnaître que ses débuts n’ont pas toujours été alignés avec les pratiques bienveillantes qu’elle prône aujourd’hui. Des expériences marquantes, parfois inconfortables, l’ont poussée à remettre en question ses méthodes.

« Je crois qu’il y a des choses qui me sont arrivées quand j'étais jeune prof où je me suis dit : mon Dieu, je ne me reconnais pas, mais plus jamais ça ! »

Parmi les situations qui ont poussé Émilie Hanrot à remettre en question ses pratiques éducatives, il y a cet épisode où elle devait gérer la couchette en maternelle. « Il y avait un petit garçon qui ne dormait jamais. C’était la première fois que j’avais une classe, ils étaient 31, et je ne savais pas comment m’en sortir. »

Elle demande alors à la dame qui s'occupe certains jours de la couchette, si elle rencontre les mêmes problèmes. Son interlocutrice lui assure que non et lui explique sa méthode : « tu ouvres la porte, tu dis “vous avez entendu, vous avez entendu le loup ? Si tu continues, si tu ne dors pas, je vais faire rentrer le loup ! » Et elle faisait des bruits avec la porte pour faire croire aux enfants qu'il y avait un loup.

Émilie reconnaît avoir été à la fois fascinée et effrayée par cette technique. Et ce d'autant plus, le jour où, désespérée devant l'agitation de l'enfant à la couchette, elle s'est approchée de la porte sans rien dire et l'enfant l'a alors supplié : « Non, pas le loup, pas le loup ! ». L'enfant s'est tu.

C'est typiquement une expérience au cours de laquelle Émilie s'est dit :

« il va falloir que je trouve autre chose parce que je suis pas bien du tout. Et je m'en suis voulu terriblement d'avoir eu ce geste. Et en même temps je me suis dit, mais comment on en est arrivé là en fait ? »

Cet épisode a fait partie des tournants dans sa réflexion sur son rôle d’enseignante et dans l'évolution de sa posture.

« Je pense que mes pratiques ont beaucoup évolué et et donc mon regard a aussi changé, mon regard sur les enfants. Et donc ça, c'est très positif parce que je pense que je les comprends mieux et que je sais mieux comment appréhender certaines situations qui pouvaient me faire peur ou pour lesquelles j'avais des réactions qui ne me plaisaient pas. »

C’est en observant des collègues inspirants, comme une enseignante qu’elle décrit comme ayant un magic touch, qu’elle a commencé à envisager une autre approche. Cette collègue « avait des enfants calmes, sereins, heureux, sans jamais élever la voix », ce qui a été pour Émilie une véritable révélation.

Aujourd’hui, Émilie se définit comme une enseignante qui expérimente constamment, en s’adaptant aux besoins des enfants.

« Ma classe, c’est un laboratoire : si une activité ne fonctionne pas, je lâche ; si elle prend, je vais encourager. »

À l'écoute de l'épisode, on comprend que faire aimer l'école aux enfants, mais également la kiffer en tant qu'enseignante, c'est avoir une capacité à s’adapter, à se questionner, à se remettre en question, à apprendre de ses erreurs et à évoluer.

Émilie Hanrot a progressivement construit sa vision « positive » de l’école, pour faire de la classe un lieu de joie et d’épanouissement. L’apprentissage devient une expérience partagée et elle fait aimer l’école aux enfants.

FAQ - Faire aimer l'école aux enfants

Comment faire aimer l’école aux enfants ?

Faire aimer l’école repose sur plusieurs leviers clés :

  • créer un climat de classe positif avec des règles claires et bienveillantes ;

  • encourager la motivation intrinsèque en laissant les enfants explorer leurs centres d’intérêt ;

  • valoriser leurs réussites ;

  • intégrer les émotions dans l’apprentissage ;

  • nouer une relation de confiance avec les parents en étant à leur écoute.

Ces approches, issues de l’expérience d’Émilie Hanrot, s’adressent aussi bien aux enseignants qu’aux parents.

Pourquoi est-il important de faire aimer l’école ?

L’école est un lieu central pour le développement intellectuel, émotionnel et social des enfants. Une expérience scolaire positive renforce leur motivation, leur confiance en eux, et leur envie d’apprendre. Faire aimer l’école contribue non seulement à la réussite scolaire, mais aussi au bien-être émotionnel des élèves.

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